3,1 millions de subventions pour de nouveaux projets de recherche au PSI

Des chercheurs de l’Institut Paul Scherrer PSI reçoivent deux prestigieux SNFS Starting Grants du Fonds national suisse (FNS) d’un montant total de 3,1 millions de francs suisses. Ces subsides financent de nouveaux projets dans les domaines de la physique des solides et de la chimie physique.

En raison de la non-participation actuelle de la Suisse au programme européen de recherche et d’innovation Horizon Europe, le FNS a lancé, sur mandat de la Confédération, les SNSF Starting Grants 2022 comme mesure transitoire. Ce programme a pour mission d’encourager financièrement des projets de recherche innovants en Suisse. L’instrument est ouvert à toutes les disciplines et tous les sujets. Des chercheurs de tous les pays peuvent y participer. Zurab Guguchia et Kirsten Schnorr ont été distingués par l’une de ces contributions d’encouragement à hauteur de respectivement 1,8 et 1,3 millions de francs suisses. Ces montants leur permettent de monter et de diriger leur propre groupe de recherche pour une durée de cinq ans, afin de réaliser leurs projets dans le domaine de la physique des solides et de la chimie physique.

Zurab Guguchia au Laboratoire de spectroscopie de spin muon au PSI. Dans le cadre de son projet soutenu par le SNF, il veut utiliser cette installation pour comprendre le phénomène de la supraconductivité à haute température. © Institut Paul Scherrer PSI/Markus Fischer

Réseaux de Kagomé et supraconducteurs

Le projet de Zurab Guguchia porte le titre Unconventional correlated quantum phases of layered materials et se penche sur les propriétés de mécanique quantique de solides multicouches. Les structures bidimensionnelles de tels matériaux sont fortement liées à l’interne, mais interagissent que faiblement avec les couches voisines. Cela permet d’isoler les différentes couches et d’exploiter leurs propriétés électroniques et magnétiques uniques. L’un des objectifs à long terme du projet est de créer les bases pour le développement de nouveaux matériaux qui pourraient être utilisés par exemple dans les calculateurs quantiques.

Un exemple sur lequel Zurab Guguchia veut se pencher plus intensément à l’avenir est les réseaux de Kagomé, dans lesquels les atomes s’organisent selon une géométrie bien précise. Le nom fait référence aux motifs des paniers en bambou traditionnels japonais: un réseau de triangles qui se divisent dans les coins. «La géométrie inhabituelle des atomes dans les réseaux de Kagomé et le comportement des électrons qui en résulte, constituent, en autres, la base de compréhension des supraconducteurs dits à haute température», explique Zurab Guguchia. Les supraconducteurs sont des matériaux dont la résistance électrique devient nulle lorsqu’elle passe en dessous d'une certaine température. A la différence des supraconducteurs conventionnels, les supraconducteurs à haute température n’ont pas besoin d’être refroidis aussi fortement et fonctionnent déjà, suivant les matériaux, à moins 170 degrés Celsius au lieu de moins 270 degrés Celsius.

Zurab Guguchia travaille comme scientifique principal au Laboratoire de spectroscopie de spin muon au PSI. Le laboratoire utilise la source suisse de muons SµS, une installation qui produit des particules élémentaires appelées muons. Avec 500 milliards de muons par seconde, il s’agit de l’installation la plus performante du genre au monde. Le spin – une propriété de mécanique quantique de cette particule – interagit avec le matériau à étudier et renseigne sur ses propriétés magnétiques locales. C’est de là que découle la nature supraconductrice de ces matériaux. Pour son futur projet de recherche également, Zurab Guguchia pourra profiter de cette installation unique et élargir la gamme des paramètres d’essai pour pénétrer plus profondément dans le mécanisme microscopique de la supraconductivité. «Notre objectif est de comprendre comment les interactions au niveau de Kagomé peuvent être manipulées pour produire la supraconductivité à haute température et de nouveaux types de magnétisme», conclut Zurab Guguchia, en commentaire de son futur projet.

Kirsten Schnorr à la station expérimentale Maloja au SwissFEL. C’est ici qu’arrivent les impulsions ultracourtes de rayons X. Dans le cadre de son projet soutenu par le FNS, elle veut étudier sur cette installation les processus d’interaction chimiques et physiques entre les nanoparticules et les rayons X. © Institut Paul Scherrer PSI/Markus Fischer

Nanoparticules et rayons X

Kirsten Schnorr, scientifique principale de la station expérimentale Maloja du SwissFEL au PSI, utilise également une grande installation unique en son genre qu’abrite l’institut: le laser suisse à rayons X à électrons libres SwissFEL. Cette installation longue de 740 mètres produit des impulsions extrêmement courtes de lumière de type rayons X ayant les propriétés du laser, la longueur de ces impulsions est de l’ordre de la femtoseconde (1 femtoseconde = 0,000 000 000 000 001 seconde). Kirsten Schnorr et son équipe peuvent ainsi suivre pas à pas comment, dans une réaction chimique, les plus petits composants d’une substance se séparent et s’assemblent pour former une nouvelle substance.

Son projet s’intitule Ultrafast X-ray Induced Chemistry of Solvated Nanoparticles and Molecules. Il a pour objectif de déclencher de manière ciblée des réactions chimiques dans des nanoparticules dissoutes et de les suivre. Kirsten Schnorr a trouvé l’inspiration pour ce projet dans la médecine du cancer. «Différentes études médicales ont montré que certaines nanoparticules injectées dans des cellules cancéreuses augmentaient considérablement l’efficacité des thérapies aux rayons X», explique-t-elle. Toutefois, on ne comprend pas encore en détail comment se déroulent les mécanismes de réaction sous-jacents.

Les éléments lourds, comme l’or, absorbent les rayons X beaucoup plus efficacement que les éléments légers. Le fait d’injecter ces éléments sous forme de nanoparticules dans les cellules cancéreuses permet donc de déposer une grande quantité de rayons X de manière ciblée. Mieux comprendre les processus chimiques sous-jacents permettrait d’atteindre des objectifs de traitement en radiothérapie avec une dose moindre de rayonnement que celle utilisée aujourd’hui, ou de combattre plus efficacement les tumeurs particulièrement résistantes aux rayons. «Avec le SwissFEL, nous avons le bon instrument pour étudier précisément ce qui se passe lors des interactions chimiques et physiques entre les nanoparticules et les rayons X», souligne Kirsten Schnorr.

Pour ce faire, les nanoparticules sont dissoutes dans un liquide et irradiées aux rayons X. L’irradiation entraîne des explosions locales d’électrons de basse énergie très réactifs, qui interagissent à leur tour avec leur environnement. Le SwissFEL permet un contrôle spatial inégalé à ce jour de cette répartition d’énergie à des échelles de temps de quelques femtosecondes. «Ce genre de nouvelles connaissances fondamentales pourraient être immédiatement utilisés pour améliorer les applications dans lesquelles des centres de réactions ciblés sont importants, comme par exemple la radiothérapie à l’aide des nanoparticules», conclut Kirsten Schnorr.

Les deux subsides de recherche ont été attribués à des projets qui ne peuvent être conduits qu’à quelques installations de recherche dans le monde, comme celles du PSI. Outre Zurab Guguchia et Kirsten Schnorr, Max Zoller, physicien au PSI, s’est vu attribuer un subside de 1,7 millions de francs suisses. Son projet relève de la physique théorique des particules et vise le développement de nouvelles méthodes et d’instruments automatisés pour calculer des prédictions de haute précision, par exemple pour le Large Hadron Collider au CERN. Le projet sera conduit à l’Université de Zurich et au PSI, qui fera donc office de co-hébergeur. Tomáš Bzdušek mène lui aussi de la recherche dans le domaine de la physique théorique. Son projet New paradigms for topological matter: delicate, multi-gap, hyperbolic s’est vu attribuer un subside de 1,7 millions de francs suisses. Ce physicien du PSI mènera son projet à l’Université de Zurich.

À propos du PSI

L'Institut Paul Scherrer PSI développe, construit et exploite des grandes installations de recherche complexes et les met à la disposition de la communauté scientifique nationale et internationale. Les domaines de recherche de l'institut sont centrés sur des technologies d'avenir, énergie et climat, innovation santé ainsi que fondements de la nature. La formation des générations futures est un souci central du PSI. Pour cette raison, environ un quart de nos collaborateurs sont des postdocs, des doctorants ou des apprentis. Au total, le PSI emploie 2200 personnes, étant ainsi le plus grand institut de recherche de Suisse. Le budget annuel est d'environ CHF 400 millions. Le PSI fait partie du domaine des EPF, les autres membres étant l'ETH Zurich, l'EPF Lausanne, l'Eawag (Institut de Recherche de l'Eau), l'Empa (Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherche) et le WSL (Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage). (Mise à jour: mai 2022)

Dr Zurab Guguchia
Laboratoire de spectroscopie de spin muon
Recherche avec neutrons et muons
Institut Paul Scherrer PSI

+41 56 310 55 64
zurab.guguchia@psi.ch 
[anglais]

Dr Kirsten Schnorr
Station expérimentale Maloja
Sciences photonique
Institut Paul Scherrer PSI

+41 56 310 27 86
kirsten.schnorr@psi.ch 
[allemand, anglais]

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