Les nouvelles énergies renouvelables sur la voie de l’intégration

La Stratégie énergétique 2050 de la Confédération prévoit un développement important des énergies renouvelables, comme l’énergie solaire et l’énergie éolienne. L’intégration de cette énergie décentralisée et produite avec des fluctuations temporelles représente un important défi pour les réseaux électriques. Une solution possible serait d’exploiter les excès de courant qui surchargent les réseaux pour produire des gaz à haut rendement, comme l’hydrogène ou le méthane. L’énergie électrique serait ainsi stockée sous forme d’énergie chimique. Par la suite, en fonction des besoins, ces gaz pourraient être de nouveau transformés en électricité, en chaleur ou en énergie cinétique (moteurs à gaz). Ce concept, appelé « conversion d’électricité en gaz » (ou « power to gas »), est au centre de la nouvelle plate-forme Energy System Integration (ESI) au PSI.

Représentation schématique de «power to gas» comme une approche de solution pour l'intégration des nouvelles énergies renouvelables. Source: Institut Paul Scherrer, EMPA.
Représentation schématique de la structure de la plate-forme ESI au PSI. Source: Institut Paul Scherrer.

L’augmentation de la part d’électricité d’origine renouvelable devrait rendre le futur énergétique suisse plus écologique. C’est ce que prévoit la Stratégie énergétique 2050 de la Confédération. Mais une augmentation de la part d’électricité d’origine solaire ou éolienne place les réseaux électriques face à un important défi. Car quand le vent souffle plus fort, ou quand le soleil brille davantage, il peut y avoir surproduction d’électricité. Or le réseau électrique ne peut pas absorber plus de courant qu’il n’en dépense, sans quoi il est surchargé et en rupture d’équilibre. L’électricité renouvelable doit donc être « limitée » dans ce genre de cas – tel est le terme utilisé pour désigner l’arrêt de l’injection de courant dans le réseau. C’est d’autant plus regrettable que cette électricité ne peut pas être retrouvée plus tard, de nuit, ou en cas de vent faible. C’était du moins le cas jusqu’à présent.

L’énergie renouvelable qui n’atteint pas le réseau électrique est une occasion manquée de protéger le climat. De plus, en Europe, elle coûte cher. Ainsi, les exploitants de réseaux du Land allemand de Schleswig-Holstein doivent verser chaque année quelque 25 millions d’euros de compensations, parce qu’il arrive que leur réseau surchargé ne puisse pas accueillir l’électricité éolienne, produite notamment dans la Mer du Nord.

Stocker l’électricité sous forme de gaz

Une solution possible à ce problème est au centre de la nouvelle plate-forme ESI du PSI. Cette technologie est appelée « conversion d’électricité en gaz » (ou « power to gas »). Cela revient à transformer l’électricité excédentaire d’origine renouvelable en gaz à haut rendement (hydrogène ou méthane). La surproduction d’électricité est ainsi stockée sous forme d’énergie chimique. Ces vecteurs énergétiques gazeux peuvent être stockés longtemps et transportés sur de longues distances. Au besoin, ils sont convertis en électricité ou en chaleur. Outre l’approvisionnement des ménages, des entreprises et de l’industrie, une utilisation comme carburant pour la mobilité est également envisageable, par exemple avec des véhicules au gaz ou des voitures électriques à pile à combustible. Pour ces applications dans le domaine de la mobilité, le PSI collabore avec le « Future Mobility Demonstrator » de l’EMPA à Dübendorf.

Le concept de la conversion de l’électricité en gaz est composé de deux étapes : pour commencer, l’électricité excédentaire est utilisée pour dissocier les molécules d’eau en hydrogène et en oxygène, à l’aide d’un électrolyseur. Ensuite, on ajoute du CO2 à l’hydrogène, pour produire du gaz synthétique (méthane).

Différents composants de la technologie « power to gas » font depuis de nombreuses années l’objet de recherches au PSI. A l’instar de la membrane électrolyte polymère et des catalyseurs pour cathodes, qui forment le cœur de l’électrolyseur. Les chercheurs du PSI connaissent bien également le domaine de la production de méthane – notamment à partir de la biomasse. Enfin, le PSI jouit d’une expertise d’envergure par rapport aux technologies de production d’électricité à partir du stockage de gaz. Elle est due aux années de recherche menées à l’institut dans les domaines des piles à combustible, des moteurs à combustion et des turbines à gaz.

Accumuler de l’expérience au niveau systémique

Dans le cadre de la plate-forme ESI, il s’agit à présent d’étudier l’interaction complexe de ces composants, analysés isolément jusqu’ici. C’est une première. L’objectif des chercheurs est de réaliser un système d’installation d’une puissance de 100 kilowatts, et d’accumuler de l’expérience en procédant à des essais communs, allant au-delà des tests de différents composants. Avec cette installation, on aimerait sonder les limites de faisabilité technique en matière de conversion d’électricité en gaz, de même que les coûts et les possibilités d’étendre la capacité à une installation de l’ordre du mégawatt. Cette installation devrait également servir aux entreprises qui s’intéressent à la technologie « power to gas » et qui souhaitent tester leurs idées et leurs innovations. Dans ce sens, la plate-forme ESI s’inscrit dans l’offre unique, dont profitent les entreprises qui s’installent dans le parc InnovAARE.

Collaboration de deux centres de compétences

Grâce à ses connaissances spécialisées et son infrastructure, le PSI assume un rôle important dans la recherche énergétique. Parmi les centres de compétences pour la recherche énergétique, initiés par la Confédération dans le cadre de son plan d’action « Recherche énergétique suisse coordonnée », le PSI en dirige deux (stockage de l’énergie et bioénergie). Dans le cadre de la plate-forme ESI, ces deux centres de compétence s’attaquent à présent ensemble à l’un des grands défis de la Stratégie énergétique 2050 : l’intégration dans le réseau d’une production fortement développée d’électricité d’origine renouvelable. Des analyses globales de systèmes énergétiques seront menées également dans le cadre des travaux à la plate-forme ESI. Certains aspects écologiques et économiques seront pris en considération, et des comparaisons seront réalisées avec des solutions alternatives à la conversion d’électricité en gaz.

Texte : Institut Paul Scherrer/Leonid Leiva

Informations supplémentaires
La plate-forme ESI dans le Park InnovAARE
Contact
Prof. Dr. Alexander Wokaun, Chef du departement de recherche Energie non-nucléaire, Institut Paul Scherrer ,
Téléphone: +41 56 310 27 51, E-Mail: alexander.wokaun@psi.ch

Dr. Peter Jansohn, Chef du projet plate-forme ESI, Institut Paul Scherrer,
Téléphone: +41 56 310 28 71, E-mail: peter.jansohn@psi.ch