Des chercheurs de l’Institut Paul Scherrer (PSI) ont fait la démonstration à l’échelle du laboratoire d’un processus thermique solaire de production d’oxyde de zinc (un composé important pour la technologie), à partir de produits recyclés du zinc. Le degré de pureté du produit solaire dépasse celui que permet d’obtenir la voie industrielle établie.
Le zinc est l’un des éléments les plus importants du monde moderne : composant du laiton et du bronze, il est présent dans une large palette de produits, mais aussi de plus en plus demandé dans l’industrie cosmétique et l’industrie alimentaire. C’est toutefois la protection anticorrosion qui se taille la part du lion de la production mondiale de zinc : le zingage permet en effet chaque année de rendre des millions de tonnes d’acier résistantes aux intempéries, pour les carrosseries de véhicules, par exemple.
Les aciéries représentent donc la source principale de matières premières secondaires non minérales pour la fabrication du zinc. La poussière de filtre, produite lors du recyclage de l’acier galvanisé dans les fours à arc électrique, est composée jusqu’à 35% de zinc. En raison de sa teneur en métaux lourds divers, cette poussière est classée déchet dangereux, et doit donc être éliminée dans des sites spéciaux ou des décharges. Les coûts d’élimination importants et le renforcement de la sévérité des normes écologiques remettent de plus en plus en question la pratique, qui consiste à jeter la poussière de filtre, car elle est critique, ne serait-ce que du point de vue du ménagement des ressources. Entre-temps, tout de même, quelque 40% de cette poussière de fours à arc électrique, qui représente plus de 7 millions de tonnes par année, n’est plus mise à la décharge, mais retraitée pour être recyclée.
Le procédé industriel établi
Le procédé le plus fréquent, qui s’est établi pour la récupération d’oxyde de zinc à partir de cette poussière de filtre, est appelé procédé Waelz. L’oxyde de zinc issu de la poussière est d’abord réduit en zinc par réaction avec le carbone dans un four rotatif, à des températures d’environ 1200ºC. A la température qui règne dans le four, le zinc est gazeux, puis il est réoxydé avec l’oxygène de l’air ambiant lors de la réaction suivante. Le produit, ainsi obtenu sous forme de poudre, est appelé oxyde Waelz.
L’oxyde Waelz brut contient entre 70% et 75% d’oxyde de zinc, mais présente aussi des teneurs relativement importantes de liaisons de chlore, de fluor et de plomb. Il n’est donc pas pur. Or, pour de nombreuses applications, l’industrie a besoin d’un oxyde plus pur. Raison pour laquelle l’oxyde Waelz brut est nettoyé d’une partie des impuretés chlorées et fluorées, au cours d’une autre étape. L’oxyde Waelz nettoyé présente une teneur de zinc de plus de 80%, alors que les teneurs indésirables en chlore et en fluor restent inférieures à respectivement 0,1% et 0,15%.
Une voie alternative pour obtenir un oxyde de zinc encore plus pur
Des chercheurs du PSI ont à présent démontré à l’échelle du laboratoire une voie solaire thermique pour le nettoyage de l’oxyde Waelz. Le travail a été conduit en collaboration aves des chercheurs de la Montanuniversität à Leoben, en Autriche, et par le partenaire industriel Befesa Steel AG. La substance de départ était de l’oxyde Waelz brut, donc non nettoyé. Ce dernier a été traité dans un réacteur solaire, chauffé par le rayonnement concentré du simulateur solaire à haut-flux du PSI. Dans ce simulateur, dix lampes au xénon servent de sources de rayonnement. A l’aide de miroirs, leur lumière est concentrée à plusieurs milliers de fois la densité du rayonnement solaire sur Terre. Sous l’irradiation concentrée de cinq de ces soleils artificiels, l’oxyde Waelz a été chauffé à une température de 1300ºC, afin de faire s’évaporer les liaisons indésirables de plomb et de chlore, et de nettoyer ainsi l’oxyde Waelz.
Réduction draconienne de la teneur en plomb
Le résultat de cette « recuisson solaire » s’est avéré réjouissant : l’oxyde de zinc obtenu à partir de l’oxyde Waelz brut était meilleur que celui que l’on obtient lors du nettoyage industriel conventionnel. La teneur indésirable en plomb, notamment, a été réduite de manière draconienne : à moins de 0,1%, contre quelque 5% pour l’oxyde Waelz nettoyé. La diminution réussie de la teneur en plomb est particulièrement importante, dans la perspective d’un traitement ultérieur de réduction de l’oxyde de zinc en zinc. Le procédé électrolyte utilisé dans ce but par l’industrie supporte en effet mal des concentrations de plomb même relativement faibles.
L’oxyde de zinc enrichi par le biais de procédé solaire a également pu être réduit en zinc dans le réacteur solaire, en réagissant avec le carbone. Cette réduction, dite carbothermique solaire, a d’ailleurs déjà été étudiée en détail par des chercheurs du PSI dans le cadre d’un autre projet de recherche (http://www.psi.ch/lst/solzinc).
Texte: Leonid Leiva
Contact
Dr. Christian Wieckert, Laboratoire de technologie solaire, Institut Paul Scherrer ,Téléphone: +41 56 310 44 07, E-Mail: christian.wieckert@psi.ch
Publication originale
Thermal recycling of Waelz oxide using concentrated solar energyN. Tzouganatos, R. Matter, C. Wieckert, J. Antrekowitsch, M. Gamroth, A. Steinfeld
JOM : Vol. 65. no. 12, Dec. 2013
DOI: 10.1007/s11837-013-0778-x
Article connexe
14 janvier 2013
Le soleil se lève aussi pour le ciment
Le ciment est le liant universel dans la construction de bâtiments modernes. Comme composant du béton et d'autres matériaux de construction, son volume de production fait de lui l'un des biens économiques les plus importants dans le monde. Toutefois, la fabrication de ciment consomme d'énormes quantités d'énergie provenant en grande partie de la combustion de carburants fossiles. Les chercheurs de l'Institut Paul Scherrer et de la société Holcim, un producteur de ciment suisse aux activités internationales, ont décidé de changer cette situation.